La Révolution

Fin des privilèges et début du braconnage

Le droit de pêche est un privilège réservé aux seigneurs laïcs et religieux. Dès le XIIIe siècle, les rois qui se succèdent sur le trône de France prennent de multiples ordonnances pour réglementer plus ou moins la pêche et la vente de poissons. En période de frai, la pêche est interdite, mais cette interdiction ne s’applique pas au saumon.

Malgré de nombreux conflits d’intérêt avec les seigneurs locaux, les monarques, jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, limitent la dévastation des cours d’eau. En 1792, l’abolition des droits seigneuriaux, entraînant la liberté de pêche pour tous les citoyens, provoque l’accélération de la dépopulation des cours d’eau. Le Directoire et l’Empire rétablissent les interdictions royales et promulguent une loi autorisant la pêche dans les rivières navigables aux détenteurs de licence et aux personnes adjudicataires de la pêche. Pour les rivières non navigables, la pêche est confiée par «l’avis du Conseil d’Etat du 27 pluviôse an XIII, non aux communes, mais aux propriétaires riverains en compensation des inconvénients attachés au voisinage de ces rivières».

Cependant, ces réglementations n’enrayent pas un phénomène apparu à la Révolution : le braconnage. L’appât du gain pousse les braconniers à tirer toujours plus partie de la rivière au détriment de la ressource. Le saumon, dont la valeur marchande ne cesse de croître, fait l’objet de pêche clandestine.

Les braconniers utilisent alors le trident pour capturer leur proie et ce, en toute impunité ! Cette pêche au trident se déroule souvent de nuit à la fin de l’été époque de basses eaux ou en période de frai. Dans les gorges de l’Allier entre Monistrol et Alleyras ou plus en aval entre Langeac et Saint-Ilpize, les braconniers utilisent soit le râteau soit le fer. La pêche au filet, tendu de part et d’autre du cours d’eau permet d’attraper en masse des poissons noctambules. Deux autres techniques sont utilisées par le braco : la dynamite et le chlorure de chaux. L’empoisonnement des rivières est un fait ancien. Au début du XVIIIe siècle, il est interdit de jeter le poizon dans la Loire. Ces méthodes barbares et ancestrales vont perdurer jusqu’au milieu du XXe siècle. Les moyens répressifs de l’époque étant insuffisants.

En 1909, le Syndicat des pêcheurs à la ligne s’insurge du fait que «plus que jamais les braconniers dévalisent la rivière ; jour et nuit, sans relâche, ces pirates de l’eau se livrent à leurs exploits, emplissent leurs paniers de vandoises et autres poissons dont la pêche est interdite, et vendent ouvertement leur butin de porte en porte le lendemain, et pousse même l’audace, comme le fait s’est produit hier encore, jusqu’à faire annoncer par le tambour de ville, la mise en vente du poisson prohibé sur la place publique.» Dans un journal parisien, Le pêcheur, on peut lire que le Président de la Fédération des sociétés de pêche du bassin de la Loire a informé le Ministre de l’Agriculture de « certains faits véritablement scandaleux qui se sont passés récemment aux environs de Brioude, où le braconnage atteint paraît-il des proportions inouïes ».

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